Sans doute a-t-on soutenu à juste titre, en ce qui concerne le premier de ces points, que chaque associé à l'acte de francisation conservait un droit réel sur le navire ; mais il est également vrai qu'il a fait "apport" de la jouissance de ce droit à la copropriété en vue de permettre l'exploita­tion en commun : en réalité, une société existe qui peut, suivant certaines règles, contraindre la minorité à accepter l'aliénation ou l'hypothèque de l'objet du droit, le navire. De même, la participation aux bénéfices et aux pertes n'a ja­mais été contestée dans son principe ; par contre des discussions sont nées quant à l'étendue de la responsabilité de chaque quirataire dont on a vu que, sauf convention contraire régulièrement publiée, elle était indéfinie et solidaire. Cette dernière règle nous paraît d'ailleurs logique dans la mesure où, dans les sociétés de commerce, la responsabilité conjointe, solidaire et indéfinie des associés est de droit, sauf exceptions, déterminée par la loi. L'affection societatis" existe également puisque les associés, théoriquement du moins, collaborent en vue d'atteindre un but commun. Enfin la personnalité morale, découlant notamment de la volonté du groupement exprimée par la majorité des quirataires et de la représentation de la copropriété par le gérant (13), semble aujourd'hui admise après les hésitations passées.

De cet ensemble de constatations, il résulte qu'on ne saurait contester sérieusement la qualité de société au régime de la copropriété des navires. Mais les difficultés commencent quand il s'agit de déterminer de quel type de société il s'agit. Par la responsabilité illimitée et solidaire des associés, la Société de quirataires s'apparente à une société de personnes, mais la libre cessibilité des parts la fait ressembler à une société de capitaux.

LES INSTITUTIONS DE LA PECHE MARITIME - HISTOIRE ET EVOLUTION - p.102