males. En effet, imperceptible durant des siècles, le progrès technique n'a pendant longtemps que peu modifié la pratique du métier qui demeurait essentiellement, dans la majorité des cas, un "petit" métier à la productivité très faible, nécessitant des investissements relativement peu importants. Les populations qui s'y adonnaient, de Port-Vendres et Collioure à Nice, quoique très variées, présentaient un style de vie par­ticulier, caractérisé souvent par une ségrégation d'avec les terriens et méprisé d'eux : dans le Roussillon, nombreux étaient les pêcheurs qui vivaient à l'écart, dans des cabanes de roseaux sur la plage ; à Sète, ils se groupaient - et se groupent toujours en grande partie - dans le quartier du "Môle"; Marseille n'était pas encore le grand centre de production sardinière qu'il est devenu depuis et Nice n'abritait que quelques marins exerçant occasionnellement la pêche. Cà et là, sur la côte, en dehors de ces "grands ports", vivaient quelques petites communautés de pêcheurs-cultivateurs. Beaucoup n'étaient Français que de date relativement récente, d'origine italienne (Sète - Marseille - Nice) ou espagnole (Port-Vendres-Collioure) (24). Bref, ces populations maritimes formaient une série de groupes clos, non seulement coupés des terriens mais souvent hostiles l'un à l'autre.

Dans ce contexte général, on peut penser que les prud'homies étaient une institution parfaitement adaptée aux besoins de ces populations puisque conçues pour un cadre essentiellement artisanal où les problèmes économiques, notamment d'investissements à la production et de débouchés, n'avaient pas l'importance qu'ils ont revêtue depuis.

LES INSTITUTIONS DE LA PECHE MARITIME - HISTOIRE ET EVOLUTION - p.144