problème, la vie quotidienne à bord dangereuse. Il relève que les pertes en vies humaines sont multiples mais - détail important - particulièrement élevées parmi les matelots "classés" ; constamment, comme une litanie, du début à la fin de son enquête, reviennent les allusions à la misère, voire l'extrême détresse, des populations côtières. L'indigence en effet est grande et contribue à entretenir par absence de capitaux une fixité technique ; dans de nombreux cas, la pêche n'est destinée qu'à la consommation familiale ou locale dans le cadre d'une économie de subsistance. Cependant, il note en divers lieux des différences sociales importantes : ainsi les pêcheurs qui naviguent à la pêche hauturière font figure, semble-t-il, d'aristocrates par rapport aux pêcheurs à pied. Mais globalement, il demeure que "l'état d'isolement" géographique et social dans lequel vivent les communautés portuaires s'adonnant à la pêche les réduit à une condition "presque sauvage".

Il est difficile, en l'absence de documents historiques suffisamment nombreux, de vérifier en tous points les observations de l'enquêteur. Toutefois quelques recoupements concernant en particulier, mais non exclusivement, la pêche au hareng - sont possibles. Ainsi la fixité technique n'est contestée par personne ; elle demeurera en l'état ou presque jusqu'à la fin du XIXe ; de même le courage des pêcheurs, leur mépris quasi total du danger sont trop connus pour qu'il soit nécessaire d'insister beaucoup : ne fallait-il pas quelque hardiesse pour traverser de façon courante - dès la fin du Moyen Age - l'Océan Atlantique! A vrai dire, il semble bien qu'il s'agisse là d'une vertu atavique, dont on retrouve une trace continue à travers le temps et l'espace chez les populations

LES INSTITUTIONS DE LA PECHE MARITIME - HISTOIRE ET EVOLUTION - p.200